Alexandre SOLJENITSYNE a accueilli l'équipe d'"Apostrophes" chez lui, aux Etats Unis, dans sa propriété du Vermont à Cavendish. L'écrivain a fait construire près de la maison familiale une maison de deux étages uniquement consacrée à son travail. On le voit dans son immense salle bibliothèque en compagnie de son épouse Natalia qui est aussi son assistante. C'est dans ce cadre qu'Alexandre SOLJENITSYNE explique sa très rigoureuse méthode de travail à Bernard PIVOT.
Alexandre SOLJENITSYNE parle de la naissance de son livre "L'Archipel du goulag" : il raconte qu'après la publication de son livre "Une journée d'Ivan Denissovitch", il a reçu un "torrent de lettres" de tous les coins de la Russie, lettres dans lesquelles les anciens prisonniers du goulag (les zeks) voulaient le rencontrer pour témoigner. C'est grâce à cette documentation qu'il a écrit "L'Archipel du goulag". Il ajoute "La documentation est si immense que même de nombreux volumes ne seraient pas suffisants pour l'embrasser". "J'espère que viendra un temps quand dans ma patrie, sans obstacles, les témoins pourront se réunir...et constituer une histoire de plusieurs volumes".
Interview (en russe, traduction simultanée) d'Alexandre SOLJENITSYNE dans son bureau à Cavendish (Vermont, Etats-Unis) menée par Bernard PIVOT. L'écrivain regrette que les critiques et l'opinion publique s'intéressent à lui en tant que dissident soviétique, il aurait préféré devenir célèbre pour son oeuvre littéraire : "Je suis triste d'être célèbre non pour activité principale mais pour mon activité secondaire"
Alexandre SOLJENITSYNE décrit son travail sur la langue russe : "Les mots c'est le souffle constant de l'écrivain. Je travaille la langue russe chaque jour depuis 35 ans. Au camp, j'ai passé tout mon temps à ce travail". Il explique qu'au goulag, il a appris à retravailler les dictionnaires russes, car c'était des ouvrages qui passaient inaperçus aux yeux des autorités de la prison. Il parle de sa lutte contre le "rétricissement de la langue russe".
Invité de Bernard PIVOT, l'éditeur russe Nikita STRUVE évoque le contexte de la publication du livre d'Alexandre SOLJENITSYNE "L'Archipel du Goulag". Il raconte notamment comment le KGB a mis la main sur le manuscrit, qui devait être publié dans un premier temps en 1975, ainsi que les tentatives d'intimidation pour que SOLJENITSYNE renonce à sa publication.
Alexandre SOLJENITSYNE répond à une question des télespectateurs des "Dossiers de l'écran" concernant la signification du titre "L'Archipel du goulag". L'écrivain explique que cette multitude d'îlots que sont les goulags forment un archipel sur le territoire soviétique. Il ajoute que (sous entendu, suite à la publication de son livre) le terme "archipel" a été interdit en Union soviétique.
En conclusion de l'émission qui lui est consacrée, Alexandre SOLJENITSYNE lit (en russe sous-titré) un poème en prose intitulé "Ce qui se passe avec notre âme au cours de la nuit".
Invité sur le plateau de Bernard PIVOT pour la première fois, Alexandre SOLJENITSYNE répond (en russe, traduction simultanée) à une question posée par Jean DANIEL, directeur du "Nouvel Observateur", sur l'influence de la production industrielle sur l'état d'âme du peuple russe. SOLJENITSYNE explique que cette question lui fait de la peine car à travers son oeuvre il tente de montrer que même privés de biens matériels et d'espoir de vivre, les hommes peuvent éprouver un immense élan spirituel.
En plateau, Jean-François KAHN présente Alexandre SOLJENITSYNE comme un "grand écrivain réactionnaire". Il dénonce également l'escroquerie qui consiste à faire de SOLJENITSYNE un personnage qui arrange l'Occident.
Alexandre Soljenitsyne s'exprime sur les raisons de sa condamnation par les autorités soviétiques. Arrêté pour avoir critiqué Staline, il estime être moins innocent que les milliers de russes déportés sans raison au goulag, comme lui,
Alexandre SOLJENITSYNE se dit convaincu qu'il reviendra en Russie.
Il déclare : "Tout homme qui n'étouffe pas son intuition, qui lui fait confiance, voit se réaliser dans sa vie non pas ses souhaits, non pas ses prévisions mais ses pressentiments".